Journée Internationale du sport féminin : celles qui font le sport, avec Cléo Hénin.
Nous sommes le dimanche 24 janvier 2021, et comme souvent chaque année depuis 2014, les athlètes féminines sont mises à l’honneur. Si les athlètes ont un impact et un rôle fort à jouer, tout un écosystème d’acteur.ices est aussi fortement investi pour défendre la cause du sport au féminin, son développement et sa mise en lumière.
Cette année, pour parler de sport au féminin, nous avons posé nos questions à Cléo Hénin, passionnée de sport et créatrice du podcast -Championnes du monde- qui met en avant des athlètes françaises.
Salut Cléo, tu te présentes un peu pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Hello je m’appelle Cléo (ça on le savait déjà), j’ai 29 ans et j’ai créé il y a deux ans avec mon binôme Valentin un podcast qui s’appelle « Championnes du Monde ». Le but de ce podcast c’est de donner la parole à des femmes qui SONT et FONT le sport féminin d’aujourd’hui et de demain. Des athlètes bien sûr, mais également des femmes de l’ombre qui sont tout autant essentielles (médecins, journalistes, nutritionnistes, etc). Ces femmes sont de vraies passionnées et j’avais à cœur de les mettre en lumière et surtout de montrer à tous qu’on peut être une femme et briller, peu importe son domaine, dans le milieu du sport.
Le 24 janvier, c’est la Journée Internationale du Sport Féminin, est-ce que c’est une journée importante pour toi ?
Je ne peux pas dire non parce que c’est génial qu’une telle journée existe et c’est nécessaire de mettre en avant, avec tous les moyens possibles, le sport féminin. Mais sincèrement, la journée Internationale du Sport Féminin pour moi, c’est tous les jours ! Une journée dans l’année ce n’est pas suffisant pour véritablement attirer la lumière et faire bouger les lignes, mais je pense que les gens commencent vraiment à en prendre conscience.
On questionne souvent les athlètes sur les actions à mettre en place pour développer le sport féminin. En tant que média, c’est quoi pour toi le plus urgent/important ?
EN PARLER ! Il faut absolument que les athlètes soient identifiées, qu’on connaisse leurs noms, leurs disciplines… Plus on les verra et plus les gens s’identifieront à elles et voudront en savoir et en voir plus. Il faut raconter des histoires, leurs histoires et montrer à quel point le sport féminin est pluriel et les protagonistes passionnantes.
« Le sport féminin a moins d’audience, c’est normal que les médias ne s’y intéressent pas ! Tout est une question d’argent ». Qu’est-ce qu’on répond à ça ?
Que c’est complètement faux. C’est malheureusement un cercle vicieux assez complexe. Il est déjà beaucoup moins diffusé (environ 20%), donc forcément il fait moins d’audience. Je vais faire un peu d’auto-promo, mais dans le dernier épisode du podcast, Nathalie Sonnac qui est membre du CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel), explique tous les mécanismes qui sont mis en place et les « problèmes » que rencontrent encore aujourd’hui le sport féminin. Ça fait prendre conscience de beaucoup de choses. Je vous invite vivement à aller l’écouter !
Du coup, c’est le public qui ne s’intéresse pas au sport féminin ? Où c’est l’accès au sport féminin qui n’est pas (assez) public ?
Une chose est sûre, c’est que tous les sondages montrent que le public veut voir plus de sport féminin. En 2019, un sondage Odoxa montrait que plus de 80% des français voulaient voir plus de sport féminin à la télévision. Il y a donc une réelle demande, les français ne sont pas du tout réfractaires, au contraire ! Encore une fois c’est le serpent qui se mord la queue. Il faut véritablement que les chaines s’engagent à diffuser plus de sport féminin, ou alors qu’on leur impose. Mis à part les grosses compétitions, on ne voit pas de sport féminin sur les chaines publiques, ou alors uniquement sur les grosses compétitions ou les finales. Il faut que tout cela change et ça prend du temps…
Les chiffres s’accordent à dire que le sport féminin à une croissance forte depuis quelques années, en matière d’audience, mais aussi de licenciées dans les différentes fédérations. Doit-on s’en contenter ?
C’était vrai jusqu’à cette merveilleuse année 2020… Le secteur du sport a été durement touché, tout comme beaucoup de secteurs d’ailleurs. Et malheureusement, c’est le sport féminin qui a trinqué en premier. J’avais noté cette phrase de Me. Thierry Granturco, avocat au barreau de Paris et spécialiste du droit du sport : "La concentration des investissements privés va faire en sorte que les annonceurs, sponsors, etc, vont se serrer la ceinture et aller au plus efficace. Et aujourd’hui, le plus efficace, c’est le sport masculin. Les années à venir du sport féminin ne vont pas être sympathiques." J’espère profondément que ce sera faux, mais malheureusement, tant que la situation mondiale est telle qu’elle est, le sport va subir des jours compliqués. Mais tout n’est pas noir, car c’est justement là que les médias alternatifs ou digitaux ont leur épingle à tirer. Si la télé ne veut pas du sport, sur Internet on en veut bien et il y a des milliers de choses à faire.
Cléo Hénin et le sport féminin, c'est l'amour fou. Questions pour une championne, c'est son tour !
Une jeune fille veut jouer au foot dans la cour de récré du collège, les garçons rigolent et l’envoient balader : « les filles sont nulles en sport ». Une punchline à lui souffler ?
Pas de punchline, tu prends le ballon, tu tapes quelques dribbles et tu pars avec le ballon en leur faisant un sourire *mic drop*.
Blague à part, même si on ne sait pas dribbler ou même jouer, juste le fait d’y aller quand même, de ne pas avoir peur, d’aller outre les critiques de tes camarades, ça mérite le respect.
Si tu devais inventer un sport, il ressemblerait à quoi ?
Olala, déjà il n’y aurait pas de juge ou d’arbitre et ce serait un sport basé sur l’entraide. En gros, un sport collectif mais où nous sommes une seule et même équipe. Quelque chose qui fait également appel à la créativité mais qui défoule ! Vous ne visualisez pas du tout ? Eh bien moi non plus…mais je vais y réfléchir !
Je ne m’intéresse pas du tout au sport, fais-moi tomber amoureuse en :
- Une athlète ? Estelle Nze Minko, j’ai le droit ? Sinon, je dirais Gabriella Papadakis. C’est une femme libre, drôle, passionnée par son sport. Elle n’a pas peur d’être qui elle est et de dire ce qu’elle pense. Elle a la volonté de faire évoluer sa discipline, de faire bouger les lignes. C’est une athlète moderne alors qu’elle pratique un sport qui subit une image quelque peu désuète. Un vrai exemple ! Image:Gala
- Une équipe ? Bon bah là désolée, mais vraiment je n’ai pas d’autre choix que de dire l’équipe de France de handball (je ne mentionne pas féminine, cela va de soi). Parce que c’est l’incarnation de la joie, de la bonne humeur, de la cohésion, de l’amitié et du talent. Image:Stephane Pillaud
- Une photo ? Je crois que je choisirais une photo vraiment très récente : celle de Justine Dupont, qui surfe une vague monstrueuse à Hawaii. Parce que c’est ultra impressionnant, totalement hors nomes et en même temps on sent que c’est du pur kiffe pour elle. J’adore cette dualité. Image:L'Équipe
- Un podcast ? Mais quelle question voyons… Championnes du Monde bien évidement !
- Un documentaire ? Je dirais Rising Phoenix* (Comme des phénix) qui s’intéresse aux parcours de plusieurs athlètes paralympiques. Parce qu’on oublie très souvent de mentionner ou de parler de ces athlètes extraordinaires qui font tout autant le sport que les « valides ». Et ce documentaire est véritablement somptueux et bouleversant.
À la fin de tous les épisodes de ton podcast, tu poses à tes invitées la question suivante : « Pour toi, c’est quoi une championne ? ». Et pour toi Cléo, c’est quoi une championne ?
Je vais la faire courte : une nana qui est bien avec elle-même, qui est dans le partage, l’énergie positive et la bienveillance.
Fin de soirée, tu te retrouves solo au bar avec Le Sport Féminin, une déclaration à lui faire ?
Si seulement c’était possible, *en sirotant une énième bière bien fraiche* :
« Merci Sport féminin, tu es vraiment une pote de fou. Je me rends compte aujourd’hui à quel point je t’aime et à quel point tu m’as aidé dans ma vie. Tu m’as aidé à grandir, à prendre confiance en moi, mais aussi à me tourner vers les autres et à être plus tolérante. J’aimerais sincèrement que tout le monde te rencontre et se rende compte à quel point tu es essentielle ».
Bon puis je lui ferais très certainement un énorme câlin si on pouvait (ou lui rouler une pelle selon mon degré d’alcoolémie) !
Merci Cléo, de défendre avec nous le sport féminin !
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